Boire en grande pompe : champagne and slippers !

Dans W ou le souvenir d’enfance, Georges Perec écrit : « Un soir, nous allâmes au cinéma, Henri, Berthe, Robert, le père d’Henri, qui, je crois, venait de revenir de Paris pour nous aider à y rentrer, et moi. Le film s’appelait Le grand silence blanc et Henri était fou de joie à l’idée de le voir car il se souvenait d’une magnifique histoire de Curwood qui portait ce titre, et pendant toute la journée il m’avait parlé de la banquise et des Esquimaux, des chiens de traîneaux et des raquettes, du Klondyke et du Labrador. Mais dès les premières images nous fûmes atrocement déçus : le grand désert blanc n’était pas le Grand Nord, mais le Sahara, où un jeune officier nommé Charles de Foucauld, fatigué d’avoir fait des frasques avec des femmes de mauvaises vie (il buvait du champagne dans leurs chaussures) se faisait missionnaire malgré les objurgations de son ami le général Laperrine, qui n’était encore que capitaine, et qui arrivait trop tard avec son goum pour le sauver des méchants Touaregs (au singulier : Targui) qui assiégeaient son bordj. Je me souviens de la mort de Charles de Foucaud : il est attaché à un poteau, la balle qui l’achève lui est entré en plein dans l’œil, et le sang coule sur sa joue. »
En vérité le film qu’il vit ne s’intitulait pas Le grand silence blanc, mais L’Appel du silence (1936) et fut réalisé par Léon Poirier. Il s’agit d’un film authentiquement colonial et réactionnaire, comprenant plusieurs scènes d’un racisme sans doute ordinaire pour l’époque. Ce qui est également intéressant, c’est que les souvenirs de Perec comprennent une autre curieuse et marquante inexactitude. Dans le film, si le jeune officier Charles de Foucauld (interprété par Jean Yonnel) y boit bien du champagne, et à plusieurs reprises, il n’en boit pourtant jamais dans les souliers d’une femme. C’est sur cette pratique, à la fois mythique et fantasmatique, que l’expression anglaise « slipper champagne » résume parfaitement, qu’Olivier Caron a choisi de revenir. Il y dessine les contours de ses origines et propose un panorama de ses apparitions sur grand écran. On y comprend notamment pourquoi cette manière hautement fétichiste de boire du champagne, qui en sexualise la consommation, a été adoptée par le milieu du 7e art. Les premières femmes auxquelles les aristocrates et bourgeois otaient les souliers pour y verser du champagne furent d’abord des filles de joies, mais aussi des chanteuses et danseuses de cabaret, enfin, des comédiennes. Bientôt, ce fut au tour des actrices et acteurs de céder à ce « rituel » qui s’était développé à la Belle Époque pour s’imposer dans le Paris des Années folles.

Parmi les différentes façons dont le champagne est bu dans certains contextes, et du coup dans certains films, il en est une originale et particulièrement marquante qui consiste à le boire dans un soulier, généralement celui d’une femme. Cela m’a conduit d’une part à rechercher l’origine de cette pratique, ou d’ailleurs les origines aux vues des éléments de réponses variant d’une source à l’autre, et d’autre part à dresser une petit panorama des manières dont ce mode de dégustation, si symbolique puisque mêlant glamour et fétichisme, apparaît dans les films.

« The Champagne dance » dans la comédie musicale The silver slipper de Leslie Stuart
Photographie signée Byron de la première au Grand Opera House de Seattle le 14 avril 1904
© J. Willis Sayre Collection of Theatrical Photographs

Une tradition ancienne aux nombreuses origines

Plusieurs articles mentionnent le fait que cette manière de boire le roi des vins serait née en Russie aux environs des années 1880. Néanmoins, aucune source sérieuse n’a été trouvée qui permettrait d’étayer cette affirmation d’autant plus que le breuvage ainsi consommé serait en fait plutôt de la bière ou même de la vodka.

En débutant ma recherche sur les origines de cette pratique, j’ai essayé de m’appuyer sur des sources qui la décrivaient, et qui permettaient notamment de distinguer ce qui était avéré de ce qui avait trait au mythe.

Il semble donc, que cette manière très particulière de boire du champagne ait été évoquée pour la première fois dans l’édition du 6 juin 1754 du journal londonien The Connoisseur. Il est rapporté qu’au cours d’une joyeuse réunion un jeune débauché aurait enlevé le soulier d’une fille de joye pour le remplir de champagne et boire à sa santé.

Un siècle plus tard, on retrouve la pratique décrite dans un autre article. Il s’agit d’une critique publiée dans le journal de Melbourne The Argus daté du 16 septembre 1893, et qui portait sur un ballet classique créé en Australie : Turquoisette ou A study in blue.

Enfin, en septembre 1924 dans The saturday review, le journaliste anglais Ivor Brown dans sa critique de la revue musicale montée par André Charlot en 1924, évoque un sketch chanté, écrit par Noel Coward dont l’action se situe dans un cabaret parisien et lors duquel le comédien Morris Harvey boit du champagne dans le soulier de sa partenaire, Maisie Gay .

Extrait de l’article « Bark and Bite » d’Ivar Brown publié dans The saturday review du 27 septembre 1924

C’est d’ailleurs dans les années 1920 que cette « mode gustative » excentrique, ce « non-sens de luxe », pour reprendre les mots d’Ivor Brown, va se répandre en France, précisément dans les cabarets et les restaurants parisiens . Dans son livre Au temps des Frou Frou, publié en 1985, Bernard Briais relate une scène qui aurait eu lieu dans le célèbre restaurant Maxim’s :

Le bruit courait aussi que, chez Maxim’s, se commettaient les pires excentricités et qu’il était de bon ton de prendre le champagne dans les souliers des dames. L’origine de cette légende remonte au soir où la délicieuse Juanita de Frezia dinait en compagnie d’un grand  duc. Vêtue d’une robe pailletée d’argent dont le large décolleté laissait admirer la délicatesse de sa peau qu’une rivière de gros diamants contribuait à mettre encore plus en valeur, elle attirait les regards admirateurs de l’assistance et en particulier ceux d’un jeune homme. Celui-ci vint même s’installer à la table voisine et se mit à la dévisager avec insistance, ce qui finit par agacer Juanita. Elle lui tira plusieurs fois la langue puis, comme l’insolent continuait à la fixer avec la même effronterie, elle lui cria, rouge de colère : « fichez moi le camp, mon pauvre sot ! » et, saisissant l’un de ses escarpins, elle le lui lança rageusement à la tête. Le jeune homme, nullement troublé, alla ramasser la chaussure et, la remplissant de champagne, s’en servit comme d’un verre. Quand il eut ainsi vidé une bouteille entière, sans jamais cesser de regarder la belle, il lui rapporta la chaussure remplie d’orchidées. Désarmée par la curieuse conduite de l’inconnu, Juanita finit par lui sourire et le Grand Duc, fort amusé par toute cette aventure, l’invita à sa table.

Si donc, on l’a vu, son origine remonte au XVIIIe siècle, et est devenu une mode dans le Paris noctambule des Années folles, il reste que l’un des exemples les plus connus d’une personne dégustant du champagne dans un escarpin à talons se produisit dans l’un des bordels les plus célèbres des États-Unis aux premières heures du 4 mars 1902. C’est à l’Everleigh Club de Chicago que le Prince Henri de Prusse avait choisi de s’arrêter pour se divertir en participant à un somptueux banquet donné en son honneur. Lorsque l’orchestre présent se mit à jouer Le Beau Danube bleu de Johann Strauss, une des hôtesses, Vidette, la meilleure danseuse du club, fut invitée à se produire sur une table. Au milieu de son numéro, un de ses escarpins argentés se détacha et traversa la pièce pour heurter finalement une bouteille de champagne. Un homme qui était resté debout, un certain Adolph, le ramassa et bu le champagne qui s’était répandu dans la chaussure. L’écrivaine américaine Karen Abbott qui relate cette scène dans le livre qu’elle consacra à l’Everleigh Club, Sin in the Second City, poursuit en parlant d’une réaction en chaîne de la part de tous les convives présents à cette bacchanale. Elle écrit :

Tout l’entourage du Prince Henri se lève, arrache une pantoufle à la fille la plus proche et la tient en l’air. Les serveurs s’empressent de remplir chaque chaussure de champagne.

« Au Prince »,

« Au Kaiser »,

« Aux belles femmes du monde entier. »  

Le Prince Henri de Prusse quitta Chicago à 14 heures l’après-midi suivant, mais sa consommation de souliers lança une mode qui perdura longtemps après sa visite. « À New York, les millionnaires ne tardèrent pas à le faire en public », écrit Charles Washburn. « Lors des fêtes organisées à domicile, les maris le faisaient, dans les arrière-boutiques, les commis d’épicerie le faisaient – en fait, tout le monde le faisait… cela impressionnait bien plus une fille que de conserver sa photo dans une montre ».

Acteurs et actrices s’adonnant au rituel

L’actrice Tallulah Bankhead (1902-1968) buvant du champagne dans sa chaussure lors d’une conférence de presse au Ritz Hotel de Londres en septembre 1951

Une pratique portée sur grand écran

La première apparition sur grand écran remonte probablement au film Sex réalisé par Fred Niblo, sorti en 1920. Bien qu’il aborde la question des conséquences morales de l’infidélité, son titre particulièrement sulfureux fit scandale dans certains États des USA qui refusèrent de le projeter. L’actrice Louise Glaum y interprète magnifiquement le rôle d’une Vamp frivole séduisant un riche homme marié.

C’est dans son soulier qu’elle invite des hommes à déguster du champagne. La scène se déroule lors d’une fête où elle use de tout son sex appeal pour détourner les maris de leurs femmes, jusqu’au moment où cela finit par se retourner contre elle.

En 1932, cette manière de boire du champagne se trouve de nouveau mise en scène dans le film The Wet Parade de Victor Fleming. Cela se passe toujours à l’occasion d’une fête où tous les excès semblent permis.

Affiche du film The Wet Parade (1932) réalisé par Victor Fleming

Puis en 1934 on la retrouve, non pas à l’écran, mais décrite dans un dialogue du film You’re Telling Me ! réalisé par Erle C. Kenton dont le premier rôle était tenu par W.C. Fields.

And isn’t that, just like Sam Bisbee?

Traipsing around the country with a burlesque queen.

She was sitting on his lap, and he was drinking champagne out of her slipper.

When he sees Mrs. Price is watching him, he gets up and slams the door and locks it.

You know who she was ?

I think it was one of them fan dancers.

[Comme Sam Bisbee qui parcourait le pays en compagnie d’une reine du burlesque.
Elle était assise sur lui, et il buvait du champagne dans sa pantoufle.
Quand il a remarqué que Mme Price l’observait, il s’est levé, a claqué la porte et l’a fermée à clef.
Savez-vous qui c’était ?
Je pense une de ces danseuses à éventails.]

La même année, dans le film britannique Evergreen réalisé par Victor Saville, à l’occasion d’un banquet de mariage, un des invités se saisit de la chaussure de sa promise pour y verser du champagne avant de le boire.

Puis en 1939, c’est au tour des Marx Brothers d’évoquer cette manière d’en boire en la mentionnant dans le film At the Circus (Un jour au cirque) réalisé par Edward Buzzell, à l’occasion d’un échange absurde entre Groucho Marx et sa partenaire préférée, Margaret Dumont.

I am Mrs. Dukesbury.

Snookums!

Gracious. I don’t know you.

You mean you’ve forgotten?

I know. You have forgotten. Those June nights on the Riviera…

when we sat underneath the shimmering skies…

moonlight-bathing in the Mediterranean. We were young, gay, reckless.

The night I drank champagne from your slipper.

Two quarts. It would have held more, but you were wearing innersoles.

[Je suis Mme Dukesbury.
Mon adorée !
Mon Dieu ! Je ne vous connais pas.
Vous m’avez déjà oublié ?
C’est-à-dire…
Vous avez oublié. Nos nuits de juin au bord de la Riviera,
sous le ciel étoilé.
Les bains au clair de lune… Nous étions si jeunes et si fous…
Quand j’ai bu du champagne dans votre pantoufle.
Sans vos semelles, y aurait eu plus à boire.
]

Affiche du film At the Circus (Un jour au cirque) réalisé par Edward Buzzell

En 1936, dans Small Town Girl (La Petite Provinciale) réalisé par William A. Wellman, c’est encore lors d’un dialogue non dénué d’un certain humour que Robert Dakin (interprété par Robert Taylor) décide de d’impressionner Katherine Brannan (jouée par Janet Gaynor), pour la séduire, en évoquant le fait qu’il aurait pu boire le champagne dans son escarpin, avant de s’apercevoir un peu dépité, bien qu’amusé, que le champagne français qu’il commande ne sera en fait qu’un simple sparkling wine local sans charme…

How about some champagne for me to drink out of your slipper ?

Champagne? Why, I don’t know, I’ve nev-

Yes, I think that would be very nice.

Good, only not out of your slipper, much too little.

Two bottles of extra dry imported french champagne

You know, that the Mexicans make just south of Sacramento.

[Buvons du champagne dans votre pantoufle.
Du champagne, mais je n’en ai jamais…
Oui, très bien.
Mais pas dans votre pantoufle. Elle est bien trop petite.
Deux bouteilles brut
de champagne français,
Vous savez, celui qu’on fait à Sacramento.]

Souvent évoqué dans les dialogues, donc, ce rituel est encore décrit dans Saratoga (1937) de Jack Conway, lors d’une discussion entre Lionel Barrymore et Clark Gable au tout début du film, puis en 1942 dans Yankee doodle dandy (La Glorieuse Parade) réalisé par Michael Curtiz, lorsque que George Tobias un peu éméché le propose à Irene Manning.

May I have the honor of supping with you at Rex’s tonight after the show… and drinking champagne out of your…
pardon me, slipper?

Mr. Dietz, haven’t you forgotten that your junior partner does all the drinking?
Yes, but on special occasions I take over.

[Aurai-je l’honneur de souper avec vous ce soir? Boire le champagne dans votre… chausson?.
Allons, M. Dietz, auriez-vous oublié que boire, c’est le rayon de M. Goff!
Dans les grandes occasions, je le relaie!]

Il faut attendre, semble-t-il, 1946, et le film She Wrote the Book réalisé par Charles Lamont, pour que cette pratique se retrouve de nouveau montrée à l’écran, avec cette fois-ci, pourtant, une petite variante qui n’est pas sans conséquences symboliques. Habituellement, et d’une façon très fétichiste, c’est l’homme qui déchausse la femme afin d’utiliser son soulier pour boire le précieux liquide. Dans ce film, c’est la femme, Jane Featherstone (interprétée par Joan Davis) qui choisit d’ôter ses deux souliers pour trinquer avec l’homme qui la courtise, Jerry Marlowe (Jack Oakie), qui, avec cet acte, se trouve tout autant surpris que pataud.

Carte promotionnelle pour le film She Wrote the Book (1946) réalisé par Charles Lamont

En 1955, les spectateurs qui auraient choisis d’aller voir le film Interrupted Melody (Mélodie interrompue) réalisé par Curtis Bernhardt dans l’espoir d’apercevoir Glenn Ford boire du champagne dans un des escarpins d’Eleanor Parker, auront certainement été déçus, trompés par une des images promotionnelles diffusée à l’époque et affichée sur les devantures des cinémas. Car, si dans ce film qui retrace la vie de la chanteuse d’opéra australienne Marjorie Lawrence, l’acteur américain offre bel et bien du champagne à une Eleanor Parker légèrement ivre, et s’il récupère bien un des escarpins de l’actrice qu’il regarde un peu amusé, pour boire, il se contente de coupes. C’en est presque décevant…

Cette confusion on la retrouve également entretenue en 1963 dans les photographies qui furent diffusées pour assurer la promotion d’une comédie plutôt ratée, For Love or Money (Trois Filles à marier) réalisée par Michael Gordon mais dont le premier rôle était tenu par l’une des plus grandes stars de l’époque, Kirk Douglas. On y voyait l’acteur américain verser du Pommery dans un soulier à talon. Pour autant, dans le film, s’il verse bien un peu de champagne dans l’escarpin, et s’il pense peut-être à le boire ainsi, c’est au goulot qu’il finit par se résoudre à vider la bouteille !

Carte promotionnelle pour le film Interrupted Melody (Mélodie interrompue,1955) réalisé par Curtis Bernhardt

A l’inverse en 1955 dans Gentlemen Marry Brunettes (Les hommes épousent les brunes) réalisé par Richard Sale, la suite du célèbre Gentlemen Prefer Blondes (Les hommes préfèrent les blondes) d’Howard Hawks sorti deux ans plus tôt, ce sont bien deux hommes buvant du champagne dans les souliers des danseuses que l’on aperçoit dans une scène se déroulant dans un cabaret parisien, clin d’œil aux nuits parisiennes des années folles durant lesquelles nous avons vu que cette pratique s’était répandue.

Mentionnons également une très belle évocation dans le superbe western de John Huston The Life and times of Judge Roy Bean (Juge et Hors-la-loi), film qui évoque de manière très libre la vie d’un des personnages les plus sulfureux de l’Ouest américain, Roy Bean qui fut à la fois un hors-la-loi, un barman et un juge autoproclamé rendant une justice pour le moins expéditive. Huston le met en scène, magistralement interprété par Paul Newman, totalement amoureux de l’actrice Lillie Langtry à propos de laquelle il s’exclame:

Lillie Langtry.

The Jersey Lily.

Fairest voice, softest hair, eyes the color of a starlit night.

The most beautiful woman in all creation.

That’s who that is.

Why, even princes drink champagne from her slipper.

[Lillie Langtry…
le lis de Jersey.
La plus jolie voix, les cheveux les plus doux… la plus belle femme de la création, voilà ce qu’elle est.
Même les princes buvaient du champagne dans sa pantoufle.]

Affiche du film The Life and times of Judge Roy Bean (Juge et Hors-la-loi, 1972) réalisé par John Huston

Plus récemment, en 2001, dans le film d’horreur espagnol Tuno negro réalisé par Vicente V. Martin et Pedro L. Barbero, un des membres d’une confrérie monte sur le comptoir et vide plusieurs chaussures alignées.

Et puisque nous avons débuté ce panorama avec un film de 1920 intitulé Sex, clôturons le avec un dernier film intitulé Sex guaranteed (2015) réalisé par Brad Barnes et Todd Barnes. Zade (jouée Bella Dayne) suggère à Kevin (interprété par Grey Damon) une idée d’enseigne lumineuse pour son club de trampoline :

Maybe a bouncing stiletto
slowly filling up
with champagne.

[Peut-être un talon aiguille bondissant
se remplissant lentement
de champagne.]

Affiche du film Sex guaranteed (2015) réalisé par Brad Barnes et Todd Barnes

Pub!

Si je n’aborderai pas l’usage qui en est fait dans les téléfilms et séries TV, je souhaite, en revanche mentionner la mise en scène qui fut faite de cette pratique en 1995 dans une publicité non pas pour une marque de champagne mais pour un sparkling wine américain : le « Korbel, Califonia Champagne ».

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Champagne Slippers de créateurs

Cette « coutume », rencontrée dans les cabarets parisiens, a inspiré le célèbre créateur de chaussures Christian Louboutin. En 2004, en partenariat avec le champagne Piper-Heidsieck, il édite un coffret qu’il nomme « le rituel ». Il comprend une bouteille de champagne ainsi qu’une flûte en cristal, en forme de talon aiguille !

En décembre 2016, le créateur britannique Rupert Sanderson, célèbre pour avoir notamment créé des chaussures pour des actrices telles que Kate Winslet, Alicia Vikander ou Gwyneth Paltrow, s’est associé au restaurant glamour 34 Mayfair et au champagne Perrier-Jouët Belle Époque rosé pour créer son « Champagne Slipper ».

Il s’agit d’une mini-sculpture qui s’inspire de la décoration Art Déco du restaurant ainsi que des icônes de l’époque, dont le Chrysler Building à New York. Elle est composée de deux parties : une semelle arquée, créée à partir de laiton plaqué argent et de verre de cristal, qui sert également de support soutenant le « talon aiguille » amovible de la flûte à champagne. Elle a été réalisée en collaboration avec l’orfèvre Clive Burr.

Sur les podiums avec le « shoey » ou « shoewee »

Moins glamour que la pratique du « Slipper Champagne », dont il est pourtant, en partie, l’héritier, le « shoey » est une coutume australienne particulièrement populaire qui s’est imposée ces dernières années dans le domaine des sports mécaniques. Il s’agit tout simplement de se servir d’une de ses chaussures pour y boire parfois du champagne, très souvent de la bière ou toute autre boisson alcoolisée. Terminée la signification sexuelle, c’est désormais le fétichisme de la victoire ou du moins de la compétition qui est ainsi mis en scène. Le premier à l’avoir pratiqué sur un podium n’est autre que le pilote de Supercar David Reynolds en 2015. Un an plus tard, Jack Miller, pilote de Moto GP, célébrait sa victoire à Assen de la même manière et en 2016, Daniel Ricciardo fit un « shoey » pour la première fois lors du grand prix de Malaisie.

Daniel Ricciardo lors du grand prix de Malaisie 2016

Si la tradition s’était imposée depuis plus longtemps, le 24 août 2017, la Formula One Licensing décida de déposer le mot « shoey » auprès de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI). L’enregistrement prend en compte 25 pays, dont les États-Unis, l’Allemagne, l’Italie, la France et le Royaume-Uni.

Le dépôt du mot ne concerne qu’une catégorie. En effet, l’enregistrement n’est valable que pour les flacons, les verres, les bouteilles, les tasses, les sculptures et les figurines. La Formule 1 a souhaité l’enregistrer également pour les vêtements mais la demande fut annulée à la suite d’une réclamation de l’Australienne Korinne Harrington qui avait déjà déposé le mot pour la marque de vêtements Mad Hueys.

Plus loin encore ?

Début 2023, le chanteur et musicien Harry Styles réalisa un « shoey » lors de son premier concert en Australie, à Perth, après qu’une personne qui venait de le faire lui ai lancé « à ton tour ! ». Pas sûr qu’il s’agissait de champagne cette fois-ci, ce qui, finalement, n’est peut-être pas plus mal…

Harry Styles réalisant un « shoey » lors d’un concert à Perth en Australie en 2023 avant de déclarer, avec humour néanmoins : « J’ai honte de moi, cette tradition est dégoûtante »

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